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I Les principes de la photographie



1) L'optique


A) La formation d'une image

* Le principe du sténopé

L'étymologie du nom français "sténopé" ( du grec stenos, étroit et ope, trou ) ne renseigne que partiellement sur la définition de l'objet en question. Le terme anglais "pinhole camera", apparu en 1856, est plus explicite : un sténopé est appareil photo avec un trou d'épingle. Ainsi, la photographie au sténopé est une photographie où le système optique n'est pas composé d'un ensemble de lentilles mais d'un simple trou.


Nous n’avons pas eu besoin de fabriquer notre propre sténopé, même si c’est un appareil assez simple de fabrication. En effet, nous avons pu découvrir les principes de la photographie grâce au sténopé du lycée que M. Brotons avait mis à notre disposition.

Le principe du sténopé est très simple et est connu depuis Aristote. La lumière, qui se propage en ligne droite est réfléchie dans toutes les directions par les objets qu’elle rencontre, selon les capacités d’absorption, de réflexion et de diffusion de ceux-ci.

Lorsqu’on positionne un écran dans une boîte sans façade avant, chaque point de cet écran reçoit les rayons lumineux issus de tous les objets alentours : on ne voit qu’une luminosité uniforme sans aucun détail car tous les points du paysage rayonnent leur lumière dans toutes les directions et l’écran reçoit sur chacun de ses points une infinité d’images qui se brouillent entre elles ; c’est la synthèse additive : aucune image n’apparaît sur l’écran.

Tous les rayons issus de A ou de B illuminent l’écran : aucune image de ces points n’apparaît.

Lorsqu’on diminue le diamètre de l’orifice du sténopé, réduisant ainsi la lumière extérieure de manière à ce que les rayons émanant du décor ne rentrent que par un seul point du sténopé, l’écran qui intercepte cette lumière ne recevra, en chacun des points précis de sa surface, que les rayons issus, en ligne droite, d’un seul point du décor placé en face de la paroi comportant le trou. Il se formera alors sur l’écran une image inversée (gauche/droite) et renversée (haut/bas) du décor extérieur.

L’image formée sur l’écran est dite « réelle » , elle donne une image fidèle de la réalité et se forme, que l’observateur soit présent ou non.

Les images des points A et B sont des tâches dont les surfaces dépendent du diamètre de l’orifice.


Plus l’orifice percé sur la face avant de la boîte est grand, plus les images des points A et B se confondent et plus l’image est floue.

On peut calculer le diamètre [ BC ] de la tâche en fonction du diamètre [ IJ ] de l’orifice : ces deux grandeurs sont proportionnelles :

D’après le théorème de Thalès :

D/ d+D = IJ / BC

D’où BC = [ IJ (d+D) ] / D


Pour un objet situé à 40m, avec le sténopé que nous avons utilise, de 8 cm de profondeur, et un trou de 0,5 mm de diamètre environ, le diamètre de la tache correspondant à un point A d’un point A est de :

(0,5.10-3 x 40,08) / 40 = 0,5.10-3

soit 0,5 mm

Lorsque l’orifice est deux fois plus grand, le diamètre de la tache est deux fois plus grand : pour un trou d’un diamètre de 1 mm, le diamètre de la tache sera également de 1 mm…



Pour obtenir une image nette, il faut donc réduire la taille de l’orifice : ici, l’image formée est nette, mais peu lumineuse.

Les images des points A et B sont des taches presque ponctuelles car le trou est assez petit pour qu’un seul rayon issu de ces points illumine l’écran.

* Nos sténopés

  

Sténopé du lycée. Novembre 2006, ciel couvert, temps d'exposition : 4 minutes (négatif, papier photo moderne) Positif du même sténopé obtenu par inversion avec le logiciel Photoshop

  

Sténopé du lycée. Février 2007, grand ciel bleu, temps d'exposition : 1 minute (négatif papier photo moderne)Positif du même sténopé obtenu par inversion avec le logiciel Photoshop


* Avantages et inconvénients du sténopé

Avantages

- C’est un « appareil-photo » très facile et très rapide à fabriquer.

- L’image d’une ligne droite est rectiligne : les lignes droites ne subissent pas les mêmes déformations qu’avec une lentille, raison pour laquelle c’est un appareil encore utilisé par les architectes.

- Les photos sont souvent très nettes : puisqu’il n’y a pas de lentille il n’y a pas non plus d’aberrations dues à celle-ci !

- Le temps d’exposition est tellement long que quelques secondes ne plus ou de moins ne changent pas fondamentalement le résultat : c’est un aspect qui peut-être pratique pour les étourdis ou les maladroits…

Inconvénients

- Pour que l’image soit nette, nous avons vu qu’il fallait que le diamètre de l’orifice soit le plus petit possible, l’image qui se forme est donc très peu lumineuse, ce qui rend le temps de pose très long (de l’ordre de 1 à 5 minutes en hiver, en fonction de la météo) : les portraits sont donc difficiles à obtenir...

- Il n’y a pas de viseur sur un sténopé, ce qui rend le cadrage difficile lorsqu’on tente de réaliser un portrait par exemple.

- Il est impossible de mettre au point, ou de zoomer sur un détail plutôt que sur un autre : sur un sténopé, tout est net, mais rien n’est très net…

- La manipulation n’est pas toujours aisée : il faut ouvrir en lumière inactinique la première boîte, puis la seconde, placer sa surface photo-sensible contre le fond, refermer, prendre une seule photo puis recommencer…


B) La lentille

* Qu'est-ce qu'une lentille ?

Une lentille est un élément traditionnellement en verre, destiné à faire converger ou diverger la lumière.

On connaît le principe d’utilisation de la lentille depuis l’Antiquité : Aristophane la décrit comme un « verre à feu » puisqu’une lentille peut être utilisée pour allumer un feu en focalisant les rayons solaires.

Aux environs de l’an 1000 , le mathématicien arabe Hassan ibn Hassan décrit le premier traité d’optique qui décrit comment le cristallin forme une image sur la rétine : il a compris le principe de la lentille et l’applique à l’œil humain. Il faut cependant attendre la fin du XIII ème siècle pour que des lentilles d’optique soient utilisées en Italie sous forme de lunettes correctrices de vue mais la qualité des lentilles est déplorable et l’utilisation scientifique de ces lentilles n’est à cette époque pas concevable. En 1609, Galilée utilise un instrument composé de deux lentilles (l’une convergente, l’autre divergente) montées dans deux tubes coulissants : c’est la première lunette astronomique.


Il existe deux types de lentilles :

- Une lentille convergente transforme un faisceau de lumière parallèle (onde plane) en un faisceau qui converge vers un point situé en aval de la lentille.

- Une lentille divergente transforme un faisceau de lumière parallèle (onde plane) en un faisceau qui semble provenir d'un point situé en amont de la lentille.


L’objectif d’un appareil photo moderne contient de nombreuses lentilles (jusqu’à 14) qui sont convergentes ou divergentes, mais nous ne nous sommes intéressés qu’au type de la lentille que nous avons placée dans notre « camera obscura », une lentille convergente.

* Le vocabulaire de la lentille

- le centre optique : centre de la lentille

- le foyer objet F

- le foyer image F’ : symétrique au foyer objet F,

- la distance focale : distance notée f à laquelle se forme l’image d’une lentille convergente d’un objet très éloigné

- la vergence de la lentille : on définit la vergence C d’une lentille à partir de la distance focale f ; la vergence s’exprime en diopties d (delta). On l’obtient par la relation :

C = 1/f

* Les trois règles d'optique fondamentales pour déterminer graphiquement la position d'une image

Soit AB un petit objet perpendiculaire à l’axe optique. On détermine la position de l’image A’B’ qui se forme derrière la lentille en appliquant les trois règles suivantes :

1) Un rayon incident (1) parallèle à l’axe optique émerge en passant par le foyer image F’.

2) Un rayon incident (2) passant par le centre optique O n’est pas dévié.

3) Un rayon incident (3) passant par le foyer objet F donne un rayon émergent parallèle à l’axe optique.

* Détermination de la distance lentille-écran

C) Notre camera obscura

* Application avec notre camera obscura

Nous avons fabriqué une camera obscura qui devait nous servir d’appareil photo, dans laquelle nous pensions pouvoir placer des surfaces photo-sensibles artisanales.

[ Pour voir comment elle a été fabriquée, cliquez ici :]

Nous avons vérifié avec notre propre appareil que plus le sujet s’éloignait, plus il nous fallait rapprocher l’écran pour que l’image soit nette. Nous appelons D la distance entre la lentille et le sujet photographié, et d la distance entre la lentille et l’écran.

La mise au point a été faite sur l’inscription du Tee-Shirt, sans diaphragme pour rendre les images plus lumineuses ; les photographies de l’écran ne sont pas parfaites, car notre appareil-photo numérique avait du mal à mettre au point… Nous avons donc choisi des incertitudes plus grandes, de l’ordre de quelques cm pour la valeur de D et de 2 mm pour la valeur de d…

La distance D devrait être la longueur de l’hypoténuse mais l’angle alpha étant très petit, la longueur de l’hypoténuse du triangle est quasiment égale à D.

Comme précédemment, d diminue lorsque D augmente et augmente lorsque D diminue. Au contraire, la taille de l’image qui se forme est plus grande lorsque D diminue et plus petite lorsque D augmente.

  

Image de gauche D = 1 m | Image de droite D = 2 m

  

Image de gauche D = 3 m | Image de droite D = 4 m


Ici, D = 14,2 m on peut considérer que le panier de basket est situé à l’infini.

La distance d est alors d'environ 27,5 cm, on sait donc que a distance focale f de la lentille est proche de 27,5 cm…

* Calcul de la distance focale f de notre lentille

Nous ne connaissions pas la vergence de notre lentille ni sa distance focale avant de la placer dans notre camera obscura. Nous avons eu l’idée de calculer cette dernière grâce à la formule de Descartes testée précédemment.

Les mesures étaient cette fois beaucoup plus délicates, d’une part parce que les distances étaient plus grandes mais aussi parce que le papier calque qui nous servait d’écran avait tendance à se plier sous le vent. Une autre cause d’erreur important est la difficulté à déterminer à quel moment l’image formée est nette. En effet, pour un même D, la distance d pourrait varier de 0.5 cm au moins car la notion de netteté est très subjective et rend la mise au point très difficile à effectuer.



Ici Regressi calcule une distance focale de 26,5 cm environ alors que nous avions déterminé en choisissant un objet situé à une grande distance (à l’infini) que la distance focale était plus proche de 27,5 cm. Cette différence est due aux incertitudes de nos mesures … Ces deux valeurs sont cependant dans le même ordre de grandeur, elles sont même assez proches ( écart relatif : 1 / 27,5 ~ 4 % ), les expérience sont concluantes !



2) La chimie


Les réactions

1)L'action de la lumière et l'image latente


En exposant une surface photosensible à la lumière, on obtient un négatif : les zones d’ombre et de lumière sont inversées par rapport à ce que nous voyons en réalité.

Cela est dû au fait que les photons de la lumière sont à l’origine de plusieurs réactions qui conduiront à former l’image.

Pour être photosensible, une surface doit contenir des cristaux d’halogénure d’argent (bromure ou chlorure d’argent (nous utiliserons l’exemple du bromure d’argent AgBr pour la suite)) en suspension dans une émulsion gélatineuse (gélatine ou albumine).

Pour obtenir AgBr, il faut faire réagir du nitrate d’argent AgNO3 en solution aqueuse avec un halogénure alcalin comme KBr.

Ag+ , NO3- + K+ + Br -  AgBr + K+ + NO3-

Il se forme alors un précipité de bromure d’argent qui contiendra les cristaux photosensibles indispensables à la réalisation des réactions suivantes.

Contrairement à ce que l’on peut penser, ce ne sont pas les ions argent Ag+ qui sont photosensibles mais les ions bromure Br-.

En effet, lors d’une exposition à la lumière, les photons viennent frapper dans les ions bromure Br- contenus dans les cristaux de bromure d’argent qui libèrent alors un électron et deviennent des atomes de brome.

Br - = Br + e-

L’électron libéré est alors capté par un ion argent Ag+ qui devient à son tour un atome d’argent.

Ag+ + e- = Ag

Les ions Br – sont oxydés et les ions Ag+ sont réduits selon l’équation :

lumière

Br - + Ag+  Ag + Br .

Les atomes d’argent ainsi formés se retrouvent pris dans le réseau des autres cristaux d’halogénure d’argent. Ils restent isolés et ne forment pas de réseau métallique. On appelle ces atomes d’argent germes car il seront le point de départ de la révélation de l’image.

Le bromure d’argent non insolé ne subira pas d’oxydoréduction car, sans lumière, cette réaction est très lente. Elle ne pourra pas s’effectuer avant la révélation.

Une fois la pellicule impressionnée, il existe des zones denses en grains d’argent Ag, d’autres denses en ions Ag+ non réduits en suspension dans le gel.

A ce stade, l’image n’est pas perceptible. On la nomme image latente car elle est présente sans que l’on puisse la voir car les atomes d’argent sont pour l’instant insérés dans le réseau de bromure d’argent et n’ont pas pu former de réseau métallique.

Si l’image latente est exposée à nouveau et assez longtemps à la lumière, elle prend une teinte violacée due au brome. En effet, la réaction d’oxydoréduction se poursuit et les atomes de brome deviennent assez nombreux pour que leur couleur soit visible.

Il faut amplifier la quantité d’Ag autour des germes pour que le contraste apparaisse entre les zones éclairées et les zones non éclairées. Ce processus est celui du développement proprement dit.


b) Le révélateur :

Un révélateur classique pour photographies argentique est composé de plusieurs substances

- un solvant : l’eau

- un développateur : l’hydroquinone

C’est à proprement parler la substance qui permet de révéler l’image.

L’hydroquinone a pour formule : HO-C6H4-OH .

Nous la noterons H2Q pour simplifier les équations.

L’hydroquinone est le réducteur du couple 2H +, Q / H2Q.

La quinone est notée Q.

2 e- + 2H + + Q = H2Q

L’hydroquinone va réagir avec les ions argent qui constituent l’oxydant du couple Ag + / Ag

e- + Ag + = Ag

L’équation de la réaction qui se produit entre les ions argent et l’hydroquinone peut s’écrire :

H2Q + 2Ag +  2Ag + 2H + + Q

Ou encore:

H2Q + 2Ag + + 2HO -  2Ag + Q + 2H2O

La basicité du milieu réactionnel catalyse la réaction car les ions hydroxyde sont responsables de la basicité d’une solution. On remarque qu’ils sont nécessaires à la réaction.

Cette réaction se produit plus rapidement à partir des germes d’argent. Si on laisse la photographie trop longtemps dans le bain de révélateur, elle se produira partout et l’image sera complètement noire.

  

Molécule de quinone et complexe hydroquinone

- un accélérateur : le carbonate de sodium, le borate de sodium, le phosphate de sodium ou la soude

Cette substance apporte la basicité indispensable à la réalisation de la réaction.

Exemple du carbonate de sodium:

CO32- + 2Na + + H2O = CO3H - + OH - + 2Na +

- un conservateur : le sulfite de sodium anhydre

Il n’a aucune action sur l’image latente. Son rôle est de s’oxyder à l’air à la place de l’hydroquinone.

- un anti-voile : le bromure de potassium

Il augmente contrastes et permet d’éviter qu’un voile gris apparaisse sur l’image.

c)Le bain d'arrêt et la fixation

Après révélation de l’image, il faut plonger la photographie dans un bain d’arrêt. C’est une solution acide (pH<6). On utilise habituellement de l’acide éthanoïque peu concentré.

Ce bain sert à arrêter l’action de l’hydroquinone qui a besoin d’un milieu basique pour produire la réaction de révélation.

Le fixateur fut découvert dans les années 1820 par sir John Herschel.

Aujourd’hui, on utilise toujours le même produit pour fixer les images.

La substance découverte par Herschel est l’hyposulfite Na2S2O3, 5H2O

qui donne en solution l’ion thiosulfate S2O32-.

Structure de l’ion thiosulfate :

Il dissout les halogénures d’argent et n’attaque ni la gélatine ni l’image argentique formée.

Le pH du fixateur doit être inférieur à 4, sinon :

2H+ + S2O32- = SO2 + S + H2O

On observerait alors un dépôt de soufre.

Pour éviter cela, on ajoute au fixateur une solution tampon : l’hydrogénosulfite et sulfite de sodium qui permettent de garder un pH convenable.

L’ion thiosulfate entraîne la complexation de l’ion argent (I) et peut conduire à un grand nombre de composés différents : les ions complexes argentithiosulfate.

Ag+ + S2O32-  Ag(S2O3)-

Ag(S2O3)- + S2O32-  Ag(S2O3)23-

Ag(S2O3)23- + S2O32-  Ag(S2O3)35-

Cette complexation permet de former un complexe stable de l’ion argent Ag+ et ainsi de lui éviter d’être à nouveau réduit en Ag. Les zones qui non pas été exposées à la lumière resteront donc claires puisque les ions Ag+ ne pourront plus réagir.

Le négatif est à ce moment stabilisé et peut être exposé à la lumière du jour.

Il ne reste plus qu’à laver la photographie à l’eau pour éliminer les ions argentithiosulates formés.


La photographie est développée !



Petit résumé en images

  

  

  

  

  

  




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